Comprendre et Gérer la Colère : L'Approche de la Gestalt Thérapie

Cet article explore la nature de la colère, ses origines, ses manifestations physiques et comportementales. Il propose des pistes concrètes pour mieux la gérer et souligne l'importance de chercher de l'aide lorsque cette émotion devient envahissante.

Comme le disait la psychanalyste Karen Horney : « Si nous essayons de blesser ou de tuer, c’est parce que nous nous sentons menacés, humiliés et maltraités. C’est parce que nous nous sentons rejetés et traités de façon injuste. C’est parce que nous le ressentons ou que nous sommes vraiment touchés. Non satisfaits de nos besoins les plus pressants. »

Qu'est-ce que l'émotion de colère ?

Ressentir de la colère ponctuellement est tout à fait normal. Cependant, si une personne se sent irritée la majeure partie du temps, ou si elle a des accès de fureur fréquents et intenses, cette colère peut devenir un réel problème, en particulier si elle se mue en violence. Il est crucial, tout au long de notre existence, d'apprendre à reconnaître et à maîtriser notre colère plutôt que de la laisser nous envahir.

Les causes courantes de la colère incluent :

• Le sentiment d'avoir été traité injustement.
• Une réaction à des situations stressantes au quotidien ou dans notre environnement.
• Se sentir agressé, rabaissé, impuissant, embarrassé ou effrayé.

Parfois, l'origine de notre colère n'est pas clairement identifiée, et ce n'est pas toujours le plus important. Il n'est pas toujours nécessaire de justifier ou d'expliquer pourquoi nous ressentons une telle émotion.

La colère peut être une émotion utile, car elle nous pousse à l'action. Mais elle peut aussi être difficile à gérer, rendant notre vie plus complexe. Apprendre à la reconnaître, l'exprimer sainement et la gérer sereinement est essentiel pour notre santé mentale et notre bien-être.

Les aspects positifs de la colère

Une colère saine peut s'avérer constructive. Par exemple, elle peut :

• Nous alerter sur des situations ou des personnes qui ne nous conviennent pas, nous aidant ainsi à identifier les problèmes.
• Nous avertir et nous protéger de ce qui pourrait nous nuire.
• Nous insuffler de l'énergie et améliorer notre concentration sur une tâche importante.
• Nous motiver à agir pour des changements positifs dans le monde ou à soutenir ceux qui sont maltraités.
• Nous inciter à nous indigner, à contester et à lutter contre l'injustice ou la discrimination.
• Nous permettre de préserver notre intégrité et notre sécurité.
• Nous donner l'énergie nécessaire pour nous défendre dans des situations dangereuses (une réponse corporelle naturelle aux menaces).

Les inconvénients d'une colère mal gérée

Il est indéniable que la colère est parfois une émotion complexe à gérer. Nous avons tous des moments où nous l'avons ressentie et avons peiné à la maîtriser. Dans certaines circonstances, notre intelligence émotionnelle n'est pas suffisante, et la colère déborde, entraînant des conséquences négatives :

• Distraction de nos objectifs et priorités.
• Propos et actes impulsifs que nous regrettons par la suite.
• Difficulté à communiquer clairement et calmement.
• Conflits au sein du couple, au travail ou avec les amis.
• Sentiments de regret, de culpabilité et de honte.
• Incapacité à reconnaître ou gérer d'autres émotions comme la peur ou la tristesse.
• Négligence de notre propre bien-être.
• Perte d'estime de soi.
• Effets néfastes sur notre corps : troubles du sommeil, accélération du rythme cardiaque, problèmes respiratoires.
• Jugement négatif de la part des autres.

Quand la colère devient-elle problématique ?

Il est normal d'éprouver des difficultés à gérer la colère occasionnellement. Cependant, voici les signes qui indiquent qu'elle pourrait devenir un problème sérieux :

• Le sentiment de ne plus pouvoir contrôler votre colère, qu'elle se transforme en rage ou en haine et qu'elle domine votre vie.
• L'expression de votre colère par des comportements destructeurs ou inutiles (violence, automutilation, addictions, harcèlement).
• La peur que vos actions ne deviennent abusives.
• Un impact négatif sur vos relations interpersonnelles (couple, travail, amis, famille, études, loisirs) qui génère des conflits.
• Votre colère blesse, effraie ou bouleverse fréquemment votre entourage.
• Vous vous sentez incapable de gérer votre quotidien à cause d'une frustration constante.
• La colère occupe constamment vos pensées.
• Vous agissez ou parlez souvent de manière regrettable.
• Un impact négatif sur votre santé mentale et physique générale.
• La colère devient une émotion dominante, masquant votre capacité à ressentir d'autres sentiments (souvent observé chez les hommes pour qui la colère est plus "socialement acceptable" que la peur ou la tristesse).
• Vous vous sentez régulièrement mal dans votre peau ou votre vie à cause de cette émotion.
• Vous avez des pertes de mémoire de vos actes ou paroles sous l'emprise de la colère, perdant ainsi vos compétences relationnelles et de communication.
• Vous recourez à l'alcool, aux drogues ou à la nourriture pour apaiser votre agressivité et votre rage.
• Vous intériorisez la colère et vous punissez par l'automutilation.
• Des épisodes où votre esprit est vide, et vous libérez votre colère par la violence physique envers vous-même ou des objets, ne réalisant l'ampleur des dégâts qu'après coup.

Il est important de noter que nous ne pouvons pas faire disparaître complètement la colère. Mais si elle devient un fardeau, des solutions existent pour la comprendre et la gérer. Rechercher un soutien professionnel est crucial, surtout si vous craignez de vous mettre en danger ou de nuire à autrui (addiction, automutilation, violence).

Les manifestations de la colère

La colère se manifeste différemment chez chaque individu. Voici quelques signes courants, mais d'autres expériences émotionnelles ou difficultés peuvent aussi survenir.

Effets physiques de la colère

• Sensation d'inconfort ou de nœuds dans l'estomac.
• Oppression thoracique.
• Rythme cardiaque accéléré.
• Jambes faibles.
• Muscles tendus.
• Sensation de chaleur intense.
• Besoin fréquent d'uriner.
• Transpiration excessive.
• Maux de tête ou tension au niveau de la tête et des yeux.
• Tremblements.
• Vertiges.
• Mâchoires et poings serrés.

Effets psychologiques de la colère

• Sentiment de tension, de nervosité, d'incapacité à se détendre.
• Culpabilité et honte.
• Ressentiment envers des personnes ou des situations.
• Irritabilité accrue.
• Sentiment d'être dépassé.
• Impression de perte de contrôle.
• Sentiment d'être envahi ou de "voir rouge".
• Sentiment d'humiliation.
• L'impression d'être une bouteille de champagne agitée, dont le bouchon explose, libérant la colère violemment.

Pourquoi ressentons-nous de la colère ?

Les raisons de ressentir de la colère sont aussi variées que les individus et les situations. Elle peut découler d'une situation difficile actuelle ou d'événements passés. Parfois, elle naît de notre manière d'interpréter et de réagir face à certaines circonstances.

Chaque personne interprète les situations différemment. Ce qui provoque une grande colère chez l'un peut ne pas avoir le même effet sur l'autre. Interpréter les choses différemment ne signifie pas pour autant les interpréter "mal" si cela suscite votre colère.

Que votre colère soit liée à des événements passés ou présents, il est bénéfique de réfléchir à la façon dont nous interprétons et réagissons aux situations. Cette prise de conscience peut nous aider à mieux gérer nos émotions et à trouver des stratégies pour maîtriser notre colère.

Influence de l'enfance et de l'éducation

Notre façon d'appréhender la colère est souvent façonnée par notre éducation. Dès l'enfance, nous recevons des messages qui peuvent rendre la gestion de la colère plus complexe à l'âge adulte. Par exemple :

• Expression agressive : Si vous avez grandi en pensant qu'il est acceptable d'exprimer votre colère de manière agressive ou violente, vous n'avez peut-être pas appris à la comprendre et à la gérer sainement. Cela peut se traduire par des explosions de colère à chaque désaccord ou situation déplaisante.
• Répression de la colère : Si vous avez été éduqué à ne pas vous plaindre ou si vous avez été puni pour avoir exprimé votre colère enfant, vous pourriez avoir tendance à la réprimer. Ne pas pouvoir l'évacuer sainement peut engendrer des problèmes à long terme, des réactions inappropriées face à de nouvelles situations, ou un retournement de la colère contre vous-même.
• Peur de la colère : Avoir été témoin d'une colère incontrôlable de la part de vos parents ou d'autres adultes peut vous avoir conduit à la percevoir comme intrinsèquement destructrice et terrifiante. Cela peut générer une peur de votre propre colère, vous empêchant d'exprimer vos sentiments en sécurité. Ces émotions peuvent alors resurgir de manière inattendue et décalée.

Impact des expériences passées

La colère actuelle peut souvent être enracinée dans des expériences passées. Nous pouvons réagir plus intensément à une situation présente en raison d'une colère non résolue face à ce qui nous est arrivé auparavant.

Si vous avez vécu des situations passées qui vous ont mis en colère (abus, traumatismes, harcèlement, intimidation, que ce soit enfant ou adulte), vous pourriez encore lutter avec ces sentiments, surtout si vous n'avez pas pu les exprimer en sécurité à l'époque. Ces expériences peuvent rendre certaines situations actuelles particulièrement difficiles et susceptibles de déclencher votre colère.

Prendre conscience de ces liens peut nous aider à développer des réactions plus sûres et constructives face aux défis du présent.

Circonstances de vie actuelles

Nous pouvons également ressentir de la colère en raison de notre situation de vie actuelle, qui peut rendre la gestion émotionnelle plus difficile. Des situations qui provoquent de la colère mais que nous avons du mal à exprimer ou à résoudre sur le moment peuvent entraîner des manifestations de colère à d'autres moments.

Parmi les expériences difficiles actuelles, on peut citer :

• Stress intense : Être confronté à de nombreux problèmes dans votre vie peut vous rendre plus irritable et enclin à la colère, y compris pour des raisons sans rapport direct.
• Deuil : La colère est une facette courante du processus de deuil. Faire face à la perte d'un être cher génère des émotions complexes et parfois contradictoires.
• Discrimination ou injustice : Des expériences de racisme, de discrimination ou d'injustice peuvent engendrer une profonde colère, surtout en cas de sentiment d'impuissance ou d'incompréhension de l'entourage.
• Événements mondiaux perturbants : La colère peut surgir face à des événements troublants dans le monde, des décisions de leaders ou des attitudes d'autrui sur des sujets importants, lorsque nous nous sentons impuissants à changer les choses.
• Environnement familial sous pression : Des périodes comme les confinements sanitaires peuvent accroître la pression familiale, altérant l'environnement habituel et suscitant des tensions.

Comment la Gestalt thérapie peut vous aider à gérer la colère et les comportements violents ?

La Gestalt thérapie offre un cadre précieux pour aborder la colère et les comportements abusifs.

L'alliance thérapeutique

Le premier pas est d'établir une alliance thérapeutique basée sur la confiance, le respect et l'autonomie du patient. Il est essentiel de dépasser les éventuelles craintes de jugement ou de contrôle, et de construire une relation sécurisante.

Les ressources du patient

Le travail en Gestalt thérapie se concentre sur les ressources internes du patient, le guidant avec douceur vers de nouvelles perspectives de vie et une meilleure compréhension de soi.

Le travail de l'ombre et l'intégration des polarités

Le thérapeute cherche à comprendre en profondeur ce qui se passe pour le patient, en explorant les aspects moins accessibles de sa vie, souvent appelés "parts sombres" ou "ombre" (concept jungien). Plutôt que de nier ces facettes (agressivité, envie), la Gestalt thérapie vise l'intégration des polarités. Il ne s'agit pas de juger le "bien" ou le "mal", mais d'aider le patient à reconnaître toutes les dimensions de son être pour les intégrer de manière constructive.
Ce processus encourage le client à assumer pleinement sa responsabilité émotionnelle et à intégrer ces parts. C'est un travail exigeant mais gratifiant, permettant de dépasser et d'unifier ces aspects de la personnalité.
Par exemple, chez une personne souffrant d'addiction, une partie désire s'en libérer pour une meilleure vie, tandis qu'une autre reste connectée à l'addiction, comprenant ses mécanismes et les auto-illusions qu'elle génère.

Toutes les facettes de la personnalité

L'approche consiste à rencontrer toutes les dimensions de la personnalité, y compris les parts infantiles souvent cachées par timidité. La découverte et l'acceptation de ces différentes parties permettent de démêler les conflits internes au fur et à mesure que la confiance s'établit dans la relation thérapeutique.

L'environnement et la violence moderne

Enfin, la Gestalt thérapie explore l'environnement du patient, analysant son exposition à la violence de la société et de ses sphères familières. Des séances de thérapie familiale peuvent également s'avérer utiles pour aborder ces dynamiques.

Si vous souhaitez entreprendre un chemin thérapeutique pour surmonter votre colère et la violence qu'elle peut générer, la Gestalt thérapie propose des outils pour un changement profond.